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Dites-le vous bien, le berlingot est en voie de disparition. Enfin, pas tout de suite. Deux irréductibles carpentrassiens font de la résistance, dont Thierry Vial.

Depuis quand êtes-vous à la tête de la confiserie du mont Ventoux ?

« J’ai repris l’affaire à Thérèse Hardy en octobre 1994. Elle fabriquait des berlingots, du nougat et elle travaillait depuis les années soixante-dix avec mon père qui a une biscuiterie à Morières-lès-Avignon créée par mon grand-père. Au fil des années, s’est créé une vraie relation, c’est devenue une amie. »

C’est elle qui vous a appris le métier ?

« Oui, c’est elle qui m’a transmis son savoir-faire. Et par ma formation : un bac G2 et deux ans dans la confiserie. »

Quelles sont les machines, les gestes particuliers propres à la fabrication du berlingot ?

« Le berlingot est l’un des plus vieux bonbons de France. Il y a toute une histoire. Il a évolué au fil du temps. C’est devenu quelque chose de très manuel. Dans les années 1830, il n’y avait pas de machines. Elles se sont créées au fil du temps. Et dans les années 1900, on est entré dans une ère préindustrielle pour devenir industrielle dans les années 1930-1950. C’est vrai qu’il y a des gestes, des machines anciennes, tout un environnement, toute une histoire qui a fait qu’on a obtenu le label Entreprise du Patrimoine Vivant. »

Existe-t-il une recette du berlingot ?

« Chacun a sa recette. Il y a une adaptation que chacun fait. Au fil du temps, les technologies et les matières premières ont changé. Pour le berlingot, on utilise du sucre et du sirop de glucose et ensuite des extraits, arômes naturels ou des huiles essentielles. Pareil pour les colorants. »

Quel est votre journée de travail type ?

« Production le matin. De berlingots souvent, de nougat blanc, de nougat noir. L’après-midi, c’est préparation de commandes et, comme j’ai besoin de moins de personnes pour m’aider, je fais des sucettes, des guimauves, de la nougatine, des graines de tournesol caramélisées, des pralines. »

Quels sont vos débouchés ?

« En boutique et les revendeurs. Là, on arrive du Japon où on a passé dix jours pour vendre des berlingots à Osaka. On a fait des démonstrations dans le cadre d’un magasin qui organise une semaine France en changeant de région chaque année. En 2019, c’était la Provence et ils nous ont invités. Avec Sylvie, on faisait des démonstrations de fabrication de berlingots. »

Qu’est-ce que vous apporte le label Entreprise du Patrimoine Vivant ?

« Je trouve que c’est un joli label. Il n’est pas très connu, mais une organisation se met en place et je pense que ça va grossir au niveau de l’impact. C’est valorisant pour nous d’être labellisé Entreprise du Patrimoine Vivant. C’était un joli challenge d’essayer de l’obtenir. On l’a depuis deux ou trois ans. C’est un honneur. »

Qu’est-ce qui vous plaît dans ce métier ?

« Je suis né dedans. J’ai été un peu piqué à ça. Ça a presque été une évidence de faire ça. Où je bossais avec mon frère sur la biscuiterie. Quand il y a eu cette opportunité de reprendre la confiserie, j’ai fait ce choix. »

Quelles qualités faut-il pour être un bon confiseur ?

« Il faut être un chef d’entreprise. Il faut un peu de rigueur. On a des recettes, des applications. On dit souvent que la pâtisserie, la confiserie, c’est de la chimie. C’est vrai. Il faut de la volonté. Les poêlons il faut les porter, les travailler. Il faut de la volonté et puis de la passion. Il faut aimer ce que l’on fait sinon ce n’est pas possible. Ce sont des métiers qui nous prennent beaucoup de temps, qui mangent beaucoup notre vie en tant qu’artisan. Si on se pose la question tous les matins : qu’est-ce qu’on fait-là ? Ce n’est pas bon. On est dans un environnement qu’on s’est construit et dans lequel je me sens bien. »

À qui allez-vous transmettre le flambeau ?

« Moi j’ai deux enfants et des neveux, donc on va voir. J’en ai un qui est dans le métier et un qui n’y est pas, mais les questions sont en train de se poser. Mon fils n’est pas parti là-dedans, mais on ne sait pas ce que l’avenir nous réserve. »

Combien de berlingots produisez-vous ?

« Une vingtaine de tonnes à l’année à trois. J’avais un ouvrier qui a créé sa propre boîte. J’aimerais former quelqu’un. Le métier n’est pas compliqué. Il faut surtout trouver quelqu’un qui a envie. Quelqu’un d’un peu costaud parce qu’il faut porter des poêlons toute la journée. »