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Président du groupement des producteurs de cerises des Monts de Venasque depuis sept ans, Nicolas Auragnier exploite, à Flassan, les terres héritées de son beau-père voici trente ans. Il produit de l'AOC Ventoux, du raisin muscat, et, bien sûr, le célèbre diamant rouge.

Quelle est la particularité de la cerise des Monts de Venasque ?

« La cerise des Monts de Venasque a quarante ans. Aujourd’hui, on est trente-sept adhérents. La majorité de nos exploitations sont certifiées HVE, Haute Valeur Environnementale. Le calibre de nos cerises va de 26 à 28 millimètres pour la marque Mont de Venasque, et de 24 à 26 millimètres pour la marque Chérise. On produit aussi du très haut de gamme en barquette d’un calibre de 30 millimètres. Ce sont des cerises très demandées à Paris, dans les grandes surfaces et chez les détaillants de la Côte d’Azur. Quand je suis arrivé, le calibre de la Venasque était à 24 millimètres. C’était petit. On a réussi à la faire grossir grâce à la taille et à l’eau du canal de Carpentras. Aujourd’hui, presque toutes les parcelles sont irriguées par goutte-à-goutte ou microaspersion pour garder de l’humidité sous l’arbre en été, quand il fait très chaud. Le cerisier aime les sols drainants de Venasque et du pied du Ventoux. C’est abrité du vent. Les cerises sont brillantes, plus fermes, les queues sont vraiment vertes. »

Comment se porte le verger ?

« Nos variétés nous permettent de produire à partir de six ou sept ans. Le vieux verger est greffé sur du Sainte-Lucie, un merisier. Les nouveaux porte-greffes sont le maxma 60, qui est le plus vigoureux, et le maxma 14, qui fructifie le plus vite. La taille commence vers le 15 novembre et se prolonge jusqu’en mars. On taille en gobelet élancé pour permettre aux branches charpentières de monter et de s’écarter. Cela facilite aussi la récolte. Sur nos chevalets à trois pieds, on rentre mieux dans l’arbre. La cueillette démarre en mai. On fait plusieurs passes et l’on ramasse à la couleur selon un nuancier. Quand les copains commencent la récolte à Venasque, à Flassan, on démarre une semaine après. »

Quelles variétés de cerises produisez-vous ?

« En gros, on produit du 15 mai au 15 juillet. On récolte d’abord la Burlat, on passe ensuite à la Folfer – une variété créée par l’INRA qui n’a que douze ans d’âge – puis à la Summit. Et l’on finit avec la Belge. C’est la principale variété de la cerise des Monts de Venasque. Elle a toutes les qualités : elle est croquante, elle est juteuse, elle est sucrée. Elle tient sur l’arbre, on peut la ramasser très noire. Deux vergers de Venasque donnent aussi de la Rainier bicolore qui est bonne, mais très fragile. C’est insignifiant. Et il n’y a plus du tout de Napoléon qui est destiné à la confiserie. On récolte entre 800 et 1 200 tonnes de cerises haut de gamme. Les producteurs emballent leurs cerises chez eux puis passent au marché-gare de Carpentras pour le contrôle qualité et l’agrément. Chacun commercialise sa cerise où il veut, mais sous la marque Monts de Venasque. Beaucoup livrent sur place à un expéditeur de Carpentras. »

Qu’est-ce qui a changé depuis vos débuts ?

« Maintenant, on taille, on met de l’engrais organique. Les arbres sont poussés. Ce qui a évolué aussi, c’est le calibrage. Avant, on calibrait au champ sur des tables. Maintenant, on a tous des calibreuses à domicile. On enlève les déchets, les feuilles, les cerises fendues ou boisées et on calibre. Certains producteurs se sont équipés du tri optique. Pour détecter la présence de la mouche drosophile, c’est parfait. La mouche drosophile, on l’a vue arriver en 2011-2012 à Flassan. Sur les tables de tri toutes blanches, on voyait des taches, comme des framboises écrasées. Les cerises piquées se liquéfiaient. Pendant deux ans, plus personne ne ramassait grand-chose. L’an dernier, je pense que ce qui nous a sauvés, c’est le fort Mistral de début mai qui a décimé les populations de mouches. L’hiver, elles se cachent dans les bois, dans les arbousiers notamment. Il y a eu deux routes d’invasion : une directe par la Suisse et une indirecte par l’Amérique. »