Espace élus

Secondée par Guillaume, son compagnon, Flavie ravitaille les habitants de Lafare, La Roque-Alric, Suzette et ceux du hameau des Pousse-chiens à Bédoin. Au volant de son épicerie ambulante, elle propose des produits locaux et du lien social.

Par Abel Allemand

Changer de travail !

Qui n’a pas eu envie, un jour, de sauter le pas ? Mais, finalement, qui a osé franchir le pas ? Pendant une dizaine d’années, Flavie Integlia occupe un poste d’éducatrice au sein du foyer de l’Hermitage à Serres qui accueille des adultes handicapés. Au fil du temps, lassée par des années de pratique, elle décide de démissionner. Dans son esprit, les projets se bousculent : ouvrir une épicerie, une librairie, voire un salon de thé. Une chose est sûre, ce sera un commerce pour le côté relationnel et le lien social. Un jour, l’occasion se présente. Flavie apprend que « L’épicerie fine de Caroline », une épicerie ambulante est à céder. Elle franchit le pas et rachète le camion. Pour se lancer, elle reçoit l’aide d’Initiative Ventoux, le réseau associatif de financement des créateurs d’entreprise. Les débuts ne sont pas simples. Flavie veut un commerce à son image. Son credo ? Mettre en avant les circuits courts. « Caroline avait déjà contacté les producteurs dans les villages, explique-t-elle.On a approfondi, et le local et le bio, en misant aussi sur le vrac, sans oublier la qualité, tout en sensibilisant les gens au zéro déchet ! On s’approvisionne sur la route. On est un peu comme une épicerie-droguerie à l’ancienne où l’on trouve tout ce dont un ménage a besoin : de l’alimentaire, de la lessive, des produits d’entretien et de beauté, du vin, du papier toilette. On ne propose qu’une seule référence, maison a plein de choses. Et ce que l’on n’a pas, on peut le commander. »

L’important, c’est le lien

Et l’ouvrage ne manque pas : prendre contact avec les producteurs, se ravitailler, préparer les commandes, charger le véhicule… Très vite, Flavie comprend que, seule, ce n’est pas gérable. Depuis quelques mois, elle est donc secondée par son compagnon Guillaume, lui aussi éducateur, qu’elle a connu au foyer serrois. « On est encore en pleine structuration, mais on se régale. On a retrouvé une certaine autonomie, une certaine liberté, et on aime ce qu’on fait. On a pour ambition d’être dans l’économie circulaire le plus possible, en direct avec les producteurs. Certains de nos clients sont aussi nos fournisseurs. » L’autre aspect que le couple s’évertue à mettre en avant, c’est la personnalisation de la relation avec les clients. « On discute beaucoup avec eux, on connaît leurs goûts, leurs envies et ils nous commandent pour la semaine suivante. » Dans les villages sans boulangerie, ils commandent même le pain la veille. Flavie et Guillaume le leur achètent à Bédoin où ils résident. Et ils en prennent un peu plus, sachant qu’ils feront toujours des heureux. De leur ancien travail, ils ont gardé le côté social. S’ils ne voient plus une personne, ils s’enquièrent de sa santé. « En venant dans ces villages, on apporte de la vie, et on amène les habitants à se rencontrer. L’important, c’est le lien qui se crée avec nous, mais aussi entre eux. » Et il n’est pas rare qu’un client achète une bouteille, demande quelques gobelets à Flavie et Guillaume qui offrent alors quelques olives, et les clients du jour se partagent un apéritif sur le pouce. Comme de vieux complices.

Investir dans un camion !

Pour l’instant, les affaires vont de mieux en mieux. Mais le jeune couple d’épiciers a une envie, on peut même dire un besoin : changer de véhicule. « Celui que nous avons n’est pas fonctionnel et adapté du tout ! Il faudrait que l’on investisse dans un camion magasin avec frigo et vitrine. Lorsque l’on arrive, on est obligé de tout décharger, de tout installer. Et cela dans chaque village. On propose de la viande en direct et on a des frigos domestiques. Mais il y a des véhicules professionnels avec une vitrine réfrigérée, des chambres froides. Pour le moment, on n’en a pas les moyens, mais devant l’expansion de notre travail, on se doit d’y penser sérieusement », disent-ils d’une même voix. Pour l’instant, ils réfléchissent, se renseignent et pensent faire appel à une cagnotte solidaire en ligne, comme beaucoup s’organisent maintenant « Tout ce que l’on collectera, ce sera ça de moins à sortir pour nous », reconnaissent-ils.

Un portrait réalisé par Abel Allemand