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Ancien champion de VTT, Christian Taillefer n’a cessé d’innover en réalisant lui-même ses vélos. Une fois sa carrière terminée, il s’est lancé dans la fabrication de trottinettes électriques, d’abord pour répondre à une demande. Puis par passion.

Par Abel Allemand

Du vélo à la trottinette

Pour un sportif de haut niveau comme Christian Taillefer, le plus difficile est la reconversion. Quand il met un terme à son épopée en 1999, notre multiple champion de France, champion d’Europe, et recordman du monde de vitesse sur neige travaille d’abord dans un grand groupe de cycles, avant de passer de la pédale à la trottinette. Toute sa carrière, il a beaucoup pratiqué la descente en VTT dans les stations de ski, se liant d’amitié avec de nombreux commerçants locaux qui l’approchent alors pour rentabiliser leur offre de location de vélos. « Ils n’ont que deux mois d’été et cela coûte très cher, car il y a beaucoup de casse et les pièces de rechange manquent. Ils m’ont donc contacté pour créer une machine robuste, fiable et simple d’entretien. » Qu’à cela ne tienne ! Christian supprime les tailles qui gonflent le stock et enlève tout ce qui gêne sur un VTT, comme la selle et la transmission, pour garder le principal et bien sûr les suspensions. « C’est parti de là ! La trottinette était née ». Lorsque les premiers vélos électriques sortent, il commence à plancher lui aussi sur l’électrification de sa trottinette. « En l’absence de pédalier, on a travaillé sur un moteur installé dans le moyeu de la roue arrière. Aujourd’hui, on vend 95% de trottinettes électriques en deux roues motrices pour pouvoir crapahuter sans être coincé par le dénivelé ! » Cette double motorisation a ouvert la porte à une nouvelle clientèle. Si l’on trouve la trottinette de descente sans moteur chez les loueurs des stations de ski, la trottinette électrique deux roues motrices équipe les loueurs des petites stations vallonnées, de la plaine et du bord de mer. « Très facile d’utilisation, elle n’est pas traumatisante quand on n’a pas pratiqué de sport de toute l’année et que l’on veut se promener. La position est celle de la marche. Debout, les mains sur le guidon, on a le buste bien droit et une vision panoramique. C’est très reposant, contrairement au vélo de route et au VTT. » Et c’est sans doute la raison de son succès.

Une affaire qui roule

TROTRX, l’entreprise de Christian, qui s’occupe de la conception, du développement et de la mise au point des machines, emploie désormais neuf personnes sur son site de Saint-Didier. « Je dessine en 3D, je fais les plans et c’est fabriqué à l’étranger. La finition est réalisée à Saint-Didier. On adapte le produit au choix du client selon qu’il souhaite un ou deux moteurs, des roues de vingt ou vingt-quatre pouces, un guidon haut ou bas. On a encore une heure et demie de travail par trottinette avant la phase de test. » Si Christian reconnaît qu’il est « impossible de concevoir un produit 100% français », il est fier de développer ses propres modèles de batterie. « Toutes les cartes mères, c’est nous qui les mettons au point. Avec deux moteurs et sans assistance au pédalage, il faut suffisamment de puissance pour obtenir une autonomie en tout terrain de l’ordre soixante à quatre-vingts kilomètres. » Après, tout dépend du poids de l’usager, du dénivelé et des conditions climatiques. Pour l’heure, TROTRX travaille essentiellement avec des bases de loisirs, des collectivités locales, des sociétés de surveillance, de grandes stations de l’arc alpin et celle du mont Serein, mais aussi la police municipale de Saint-Didier et les écogardes du Parc du mont Ventoux. La trottinette, c’est une affaire qui roule.

Des projets plein les sacoches

L’avenir de l’entreprise passe par l’installation dans un nouveau bâtiment d’un peu plus de 1 000 m2 en cours de construction dans le parc d’activités Belle Croix de Venasque. Il sera équipé de bureaux, d’une zone d’assemblage et de montage, mais aussi d’une halle d’exposition qui permettra la mise en valeur de toute la gamme de trottinettes et le développement de la vente au public. Dans cette optique, Christian prépare une trottinette adaptée à la ville et dotée des toutes dernières innovations pour concurrencer la voiture sur les courts trajets lors des beaux jours. Cela passe évidemment par l’ajout d’un porte-bagages, de sacoches, de garde-boues et d’un klaxon. « C’est un beau projet qui devrait connaître le succès auprès des particuliers, une clientèle nouvelle pour nous. » Se rendre au travail ou faire ses courses en trottinette, c’est aussi une manière plus écologique et plus responsable de se déplacer. Pensez-y.